Alain Bashung, 13/10/2003, Aéronef de Lille.
Voir Bashung et mourir. Pourquoi pas ? Mais attendons
tout de même quelques siècles. Qu'il puisse revenir.
D'entre les morts. Vampire satanique ou rocker lyrique ? Telle
est la question du soir. Voir ce dandy grave et inquiétant
monter sur scène c'est un avènement. Une symbiose
physique troublante avec Gainsbourg, la noirceur roots de Johnny
Cash et l'électricité d'un punk futuriste.
Monsieur Bashung, votre prestation vendredi pour
votre premier concert d'une longue tournée, était
à la limite du supportable tellement vous étiez
beau, tellement vous étiez grand. Dernier vrai dinosaure
de la chanson française dans ce qu'elle a de plus noble,
Bashung se traîne lascif sur une scène lugubre à
souhait.
Démon de nos propres croyances, non seulement
vous avez plongé un public dans les vertiges de votre propre
amour mais vous avez tiré une caravane qui semblait légère
comme le vent qui vous porte.
Clown d'opérette ou rocker d'enfer, jamais
personne n'a idée de ce que cache votre long manteau noir.
Il n'y a plus grand chose de lumineux chez cet être qui
semble s'effacer dans l'obscurité
Enchaînant les titres d'une manière
usée et désincarnée pour jaillir en geyser
urbain, votre petite entreprise ne connaîtra jamais la crise.
Nous avons tous happé votre présence, votre insolence
(qui d'autres que vous pourrait, par exemple, porter ces vêtements
de scène sans faire sourire ? Personne !). Bashung montre
et joue de ses blessures.
J'avais l'imprudence de penser vous connaître
mais vous êtes un vrai bijou qui ressemble à un petit
enfant dans un corps qui bombe son torse d'apiculteur. Psalmodiant
ses anciens titres dans une orchestration frémissante,
se trouvant sur scène comme au bord du gouffre, plus proche
du "Cantique des cantiques" que du roublard qui égraine
ses titres sur "Confessions Publiques".
Alain accompagné d'une formation magistrale
repousse les limites scéniques d'un beau parleur vanné.
Vous qui chantez les vertiges de l'amour sachez au combien Madame
rêve et monsieur avec.
Pierre.
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